Présentation

Mardi 21 octobre 2 21 /10 /Oct 23:29


Il ne savait pas pourquoi sa voix refusait de joindre des mots pour former des phrases. Dieu qu’il détestait se retrouver dans cette situation. Cela le plongea dans une grande panique sourde. Ce fut une voix légèrement ensommeillée qui le ramena sur terre en lui demandant s’il était toujours au bout du fil.

-          Oui, oui.

Lorik se sentit un peu honteux d’appeler à cette heure, et surtout un dimanche, mais il pouvait être tellement investi dans son travail qu’il en oubliait la cadence des jours.  Il était assis à la table de son salon, les feuilles du dossier de Miralem étalées devant lui, emplies d’annotations, de post-its, de marques rouges. Son ordinateur portable ronronnait sur le côté gauche de la table, à côté d’une grande tasse vide d’où parvenait une faible odeur persistante de thé aux fruits rouges. Il y avait aussi des cadavres d’emballages de barres énergétiques et des trognons de fruits posés dans une grande assiette. Tout cela était les signes d’une longue nuit blanche de travail pour Lorik.

Il était plus exact de dire qu’il n’avait pas vu le temps passer. C’était surtout le cas quand une affaire importante arrivait. Il était un drogué de travail, ne cherchant pas tellement une vie sociale, c’était le travail qui la lui amenait.

-          J’ai fini de traiter votre dossier.

-          Pardon ?

Lorik entendit son interlocuteur faire un drôle de bruit, comme si il venait de s’étouffer avec la boisson qu’il avalait.

-          Excusez-moi, dit Miralem. J’ai manqué de m’étouffer. Je suis surpris que vous ayez fini aussi tôt.

-          C’est pourtant le cas et je vous appelle chez vous, conformément à la note que vous avez laissée sur la première page de votre dossier, au cas où je trouverais quelque chose digne d’intérêt.

-          Oui, oui. Et je suppose que c’est le cas puisque vous avez fait cette démarche ?   

-          C’est exact. Je vous appelle pour vous dire que vous risquez gros en vendant cet immobilier à votre client. Sa solvabilité est limitée à cause d’actions faites sur des entreprises à risque. De plus, avec l’aspect assez volatile et en crise du marché boursier et immobilier, ce serait plus une perte de plusieurs centaines de milliers de Livres qui vous attend, vous et le propriétaire.

Il y eut un temps de silence de la part de Miralem, celui-ci semblait réfléchir à quelque chose avant de reprendre la parole.

-          Très bien. Nous pourrions nous voir à votre bureau demain après-midi. Je ne peux pas le matin car je suis bloqué avec une visite importante.

-          Pour moi, il n’y a pas problème.

-          Merci beaucoup. Je pense que j’aurai encore du travail pour toi.

-          Pas de problème. On en rediscutera demain. Encore toutes mes excuses pour le dérangement

-          Ce n’est rien.

-          Au revoir.

-          De même, acheva Lorik en appuyant sur la petite touche rouge de son téléphone fixe.

Il souffla un bon coup, chassant par la même occasion l’angoisse qui l’avait miné en passant ce coup de téléphone. Paradoxalement, il était content. Il pouvait presque dire que Miralem le stressait, c’était une impression d’après-coup, suite au restaurant. Il se sentait obligé de faire le maximum, d’être le meilleur. Contrairement à ce qu’il laissait paraître au travail et en société, il n’était pas une personne sûre d’elle, toujours en proie au regard des gens, à leur jugement. L’arrogance et la colère n’étaient qu’une façade. Pour l’heure, ses problèmes métaphysiques avaient été chassés par un bâillement prononcé. Son corps commençait à lui réclamer le sommeil dont il l’avait privé au cours de la nuit, à l’aide de stimulants.

Sans prendre la peine de ranger les feuilles, il prit sa tasse qu’il porta jusqu’à l’évier débordant de vaisselle et l’y ajouta, complétant l’œuvre artistique bancale. Un autre bâillement se fit entendre. Tant bien que mal, il se dirigea vers sa chambre en évitant de se cogner les pieds dans les montagnes de livres qu’il y avait aussi dans le petit couloir. Deux portes s’offraient à lui. Il ouvrit tout d’abord celle de la salle de bains où il se débarrassa de ses vêtements, ne gardant que son boxer noir en guise de pyjama. Il était trop fatigué pour en chercher un dans la pile d’habits sur une vieille chaise en osier placée dans un coin. La pièce était petite mais convenait parfaitement bien à une personne seule, tout était vert outremer, comme une invitation au voyage, renforcée par des photos de paysages paradisiaques. Lorik ne jeta même pas un œil au miroir mural, préférant se trainer jusqu’à sa chambre.

Le lit avait les draps défaits de couleur grise, la couette avait été envoyée batailler avec les oreillers sur le parquet. Cela attestait des nuits agitées de Lorik, même sans personne à côté de lui. C’était d’ailleurs ce qu’il regrettait en se glissant dans son lit qu’il avait refait à la va-vite. Tout le lit était désespérément froid, mais il n’avait pas de temps à consacrer à la recherche de l’âme sœur. De plus l’expérience avec Clémentine l’avait quelque peu refroidi. Il ne voulait pas être déçu à nouveau. 

Même pas dix minutes après s’être couché, la fatigue eut raison de lui et le fit sombrer très rapidement dans un sommeil sans rêves.

 

Le lendemain après-midi, à quinze heures trente minutes, Lorik attendait de pieds fermes dans son bureau, tel un animal en cage. Tous les dossiers et feuilles étaient sur son bureau, rangés amoureusement par ordre et par classe. Il détestait le désordre dans son travail alors que c’était totalement le contraire chez lui, mais comme il disait, ce n’était qu’une broutille sans importance. Il avait eu Miralem au téléphone un peu plus tôt dans la journée pour fixer l’heure de rendez-vous.

La porte s’ouvrit et il fit un bond dont il ignorait être capable, mais ce n’était que la secrétaire qui venait lui apporter de nouveaux dossiers tout juste sortis du fax. Lorik se retint avec grand peine de l’envoyer paître mais il se rappela que c’était une jeune femme extrêmement sensible, qui pouvait par moment fondre en larmes à propos de la moindre remarque. Il n’était pas un monstre tout de même. Elle repartit aussi vite quand elle vit les traits tirés et tendus de son patron. Ce n’était pas l’heure de l’énerver avec de petits détails. Elle irait voir les collaborateurs.

Lorik se décida à s’installer à son bureau pour se calmer et feuilleter les nouvelles pages emplies de chiffres et d’écritures dactylographiées. Des coups se firent de nouveau entendre et Lorik, cette fois-ci, cria un simple « entrez » au lieu de sursauter.  

-          Bonjour.

Lorik eut droit à un sourire quand il leva les yeux et vit Miralem. Ce dernier avait un quart d’heure de retard et s’en excusa platement. Il était comme la dernière fois, avec cette tenue si étrange pour un agent immobilier de renom, mais c’était aussi ce qui faisait sa caractéristique. Il portait en bandoulière la même mallette d’ordinateur que la dernière fois au restaurant, ainsi qu’une autre plus petite, de cuir tanné marron.  

-          Bon, je crois que  nous avons du travail.

-          Oui. J’ai réuni les dossiers que vous m’aviez donnés la dernière fois, je vous laisse les prendre et les regarder.

-          Merci.

Miralem tendit sa main gauche pour attraper les dossiers concernés et se mit à les feuilleter tout en ajustant les lunettes sur son nez. Elles avaient décidé de ne pas tenir en place aujourd’hui. Il prit un petit moment pour lire silencieusement, étudier toutes les remarques apposées sur les feuilles de papier. Aucune expression ne se lisait sur son visage et Lorik avait la soudaine impression de se trouver devant son père, austère, à lui montrer son carnet de notes et à attendre la critique.

-          Merci beaucoup c’est exactement ce que je voulais savoir. Vous faites vraiment du très bon travail. Je n’aurais pas pensé cela de vous lors de notre première rencontre.

-          Et qu’avez-vous pensé ? Si ce n’est pas trop  indiscret.

-          Non, pas du tout.

Miralem eut un grand sourire en pensant à cette première rencontre très houleuse où leurs deux caractères étaient rentrés en contact très violemment.

-          J’ai pensé que vous étiez un grand connard qui avait besoin de se faire piquer pour avoir fait une telle scène dans le magasin.

-          C’est pour le moins direct. Je suis juste un peu sanguin.

-          Ca c’est sûr. Et vous ?

-          Quoi moi ?

-          Qu’aviez-vous pensé de moi ?

-          Que vous étiez un petit con qui avait besoin qu’on lui remette les idées en place.

-          Le score est à égalité alors.

-          Oui, dit Lorik en se fendant d’un grand sourire, avant de reprendre une image plus sérieuse, cadrant plus avec cette petite réunion de travail.

Le jeune homme acquiesça et ouvrit ce que sa mallette conservait jalousement. Pendant une bonne heure, ce fut un travail studieux qui fut livré. Miralem se fichait du prix que cela allait lui coûter, du moment qu’il avait ce qu’il voulait et que c’était bien fait. Il admirait la maîtrise avec laquelle Lorik comprenait les ficelles de la bourse et les exploitait à son compte.

-          Je crois qu’on a tout vu, finit par dire Miralem qui rangea toutes ses affaires qu’il avait soigneusement étalées sur une petite table basse dont disposait le grand restaurant.

-          Oui. Cette fois-ci, ça prendra plus de temps.

-          Pas de soucis. De toute façon, ces ventes-là ne seront pas conclues avant deux mois.

Les deux se levèrent en même temps et se regardèrent sans savoir quoi se dire jusqu’à ce que Miralem s’avance en tendant sa main droite pour serrer celle de Lorik. Ce que ce dernier fit, mais il garda cette main plus longtemps que voulu. Il fit quelque chose de soudain, d’imprévu, d’irréfléchi, d’illogique. Il tira d’une poigne forte cette main dans la sienne, passa son autre derrière une nuque au touché agréable et embrassa doucement son vis à vis.

Lorik ne savait pas ce qu’il lui prenait et il ne voulait pas le savoir. Le moment présent… Il comprenait enfin cette expression qui avait fédéré beaucoup de générations. Miralem se rendit, voulant sur le coup repousser cette étreinte non désirée avant de céder à cette redoutable sensualité que dégageaient ce baiser et son propriétaire à l’instant.

Deux minutes de baiser rompues par des petits coups contre l’épaisse porte du bureau de Lorik. Les deux hommes se séparèrent sans gêne, comme si cela avait été effacé aussitôt. Pourtant, Miralem ne put s’empêcher de passer un doigt sur ses lèvres un peu rougies. La secrétaire de Lorik fit son entrée et montra une grosse pile de dossiers qui ne pouvaient pas attendre une minute de plus que l’heure qu’elle avait attendue. Les deux hommes se dirent au revoir, un au revoir de travail mais chaleureux.

Lorik prit les dossiers qu’elle lui tendait de ses deux mains et la renvoya à son poste. Il ne voulait plus penser, ne sachant pas ce qu’il s’était passé dans son esprit pour qu’il fasse une telle chose. Des fois, on faisait des choses et on ignorait d’où cela venait, pour le meilleur et pour le pire.

Mais l’esprit de Lorik oublia bien vite ce qu’il s’était passé quand ses yeux s’arrêtèrent sur des dossiers tamponnés en rouge. Brusquement, il se saisit du combiné de son téléphone pour appeler sa pauvre secrétaire qu’il venait juste de renvoyer dans ses quartiers. D’une voix cassante, il demanda qui avait amené ces papiers à son agence.

-          C’est la même personne que d’habitude.

-          Il a dit quelque chose de particulier.

-          Que ça devait passer avant tout le reste. Il était très hautain.

-          Epargnez-moi vos commentaires, merci, dit-il avant de raccrocher sec.

Lorik eut un très grand soupir avant de se mettre au boulot. Encore de longues nuits blanches l’attendaient. Ce n’était pas aujourd’hui qu’il allait recommencer à avoir une vraie vie.

 

Bonsoir bonsoir

Nous vous présentons toutes nos excuses pour ce retard d’un jour sur la publication de cette histoire. D’importants travaux à rendre pour la fac en sont en responsable. Nous espérons que ce chapitre vous a tout de même plu. Prochain chapitre le 30.

Gros bisous à tous et merci de votre patience.  

 

Par Perri_et_Joy - Publié dans : Plus que nous [terminée]
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